Groupe : Members
Messages : 5,337
Inscrit : 04/03/2014
Membre no 9,661
Tribune : Non précisée
Citation (Croco91 @ 25/01/2024 12:46)
Spoiler :
Rayane Roumane, la chute d'un Petit As
Vainqueur du tournoi des Petits As il y a dix ans, l'ancien grand espoir du tennis français Rayane Roumane, jamais mieux classé que 358e mondial, a depuis totalement disparu des radars.
Quentin Moynet mis à jour le 25 janvier 2024 à 10h34
Il avait le dos légèrement voûté, comme s'il portait sur ses épaules toute la misère de son monde. Démarche nonchalante, pieds qui se traînaient et regard dans le vague, Rayane Roumane quitta au pas et sans un mot le court sous bulle du CT Chaville, dans les Hauts-de-Seine, puis s'engouffra dans l'allée, recouverte d'un fin drap blanc verglacé, qui menait au club-house. Battu quelques instants plus tôt (6-2, 7-5) par Johan Tatlot (49e français), il y récupérerait son chèque, 250 euros, mince récompense promise au demi-finaliste de cet anonyme tournoi français, sans prestige ni spectateurs, sauf quelques parents au soutien de leur progéniture sur le terrain voisin, sans tribunes, à l'exception de deux bancs de fortune installés à la va-vite, ni chauffage, alors que le thermomètre affichait - 2 °C ce 9 janvier en région parisienne. Voilà à quoi en est aujourd'hui réduit celui considéré il y a dix ans comme un grand espoir du tennis français.
Loin de l'Open d'Australie et de son opulence, le vainqueur des Petits As, le Championnat du monde des moins de 14 ans, en 2014, est comme piégé du mauvais côté de la vitre teintée. Ce n'est pas sous le soleil de Melbourne, mais dans l'hiver charbonneux de Roncq, Guyancourt, Hagetmau, Montmerle-sur-Saône, Yzeure, Mont-Saint-Aignan, L'Haÿ-les-Roses ou Talant que le jeune homme de 23 ans trimballe ces temps-ci ses raquettes et sa peine.
« Tu as l'impression qu'il n'a pas du tout envie d'être là ni de jouer », observe Benjamin Vitter, qui a perdu contre Roumane (7-5, 6-0) en finale du tournoi de Talant début janvier. « Son attitude est très bizarre, ajoute le joueur de 21 ans, classé - 2/6. Un matin, je l'amène au club parce qu'il n'avait pas de voiture. Il ne m'a pas dit un seul mot du trajet ! Dans sa bulle le mec, déconnecté. »
« Il y a eu des attentes de la part de son entourage beaucoup trop importantes au niveau financier » Olivier Soulès, ancien responsable des moins de 15 ans à la FFT
Perdu, aussi. La morosité en bandoulière, Rayane erre. Il n'est plus vraiment joueur de tennis professionnel, mais il ne saurait être autre chose. Parce que le projet du père, Norsalam Ghedjemis, manquait d'un plan B ; le fils, qui frappait déjà 150 revers et coups droits par semaine à 2 ans, a quitté les bancs de l'école très jeune. « C'était tout sur le tennis, confirme une ancienne proche de la famille. Avec une grosse pression sur le futur : qu'est-ce que tu deviens si tu n'es pas champion, si tu n'as pas de bagage scolaire, culturel, ni les codes sociaux que tu peux acquérir à l'école ? »
Le fils se pose certainement encore la question. Il n'a pas répondu aux nôtres, son paternel non plus. « Nous sommes loin de tout ça », a décliné par message ce dernier, pointé du doigt par beaucoup de ceux qui ont croisé le chemin de l'ancien prodige. « Quand tu as un tel père entraîneur, impossible de percer », soupire Pablo Belitzky, entraîneur à distance, depuis l'Argentine, du fiston en 2019.
Adoubé par Nadal en 2016
Il faut rembobiner la bande pour comprendre à quel moment elle s'est grippée. Le 26 janvier 2014 à Tarbes, Roumane devenait, à 13 ans, le premier Français à remporter les Petits As en simple et en double. Il succédait au palmarès à quelques grands noms du sport, parmi lesquels Michael Chang, Juan Carlos Ferrero, Richard Gasquet et Rafael Nadal. « Sans être une finalité, les Petits As sont un bon indicateur, explique Arnaud Di Pasquale, qui était alors directeur technique national de la FFT. Il avait vraiment un truc, un timing, une frappe de balle, un super revers... Avec Olivier Soulès, on le trouvait très fort. »
Responsable des moins de 15 ans à l'époque, Soulès acquiesce : « On était persuadé que sa carrière allait s'orienter vers le circuit international. » Ils n'étaient pas les seuls. « Rayane a un grand potentiel, il frappe très fort. Il peut aspirer à de grandes choses », observait Rafael Nadal après avoir partagé plusieurs séances d'entraînement avec le Français à Manacor, fin 2016. « Il avait hérité d'un don... C'est un beau gâchis », souffle Olivier Malaval.
Entraîneur du natif de Montreuil entre 2012 et 2014 au club des Pyramides, dans les Yvelines, il a vu les premières fissures apparaître dans le projet dès le lendemain du titre à Tarbes, lors de réunions tendues avec les dirigeants fédéraux. « Il y a eu des attentes de la part de son entourage beaucoup trop importantes au niveau financier », se souvient Soulès. « Le père de Rayane disait que Patrice Dominguez (DTN entre 2005 et 2009) avait débloqué 300 000 euros pour Gaël Monfils et il s'était mis en tête que la Fédé devait faire ça pour son fils », explique Malaval.
« Tu n'avais pas l'impression de t'adresser à un jeune de 18 ans » Corentin Denolly, basé au centre d'entraînement national en même temps que Roumane
En parallèle, une agence de marketing liée à l'Algérie aurait proposé au clan Roumane plus de 100 000 euros d'aide en échange d'un changement de nationalité. « Beaucoup lui reprochaient de dire : si la FFT ne nous aide pas, on ira voir la Fédé algérienne », indique Di Pasquale, qui n'a jamais voulu rompre le lien, même quand Roumane refusait des sélections en équipe de France de jeunes. Malaval, lui, a été mis sur la touche après un incident en marge d'une interview sur Sport +. « Je devais la faire avec Rayane, mais le père a voulu forcer le passage pour rentrer sur le plateau, se remémore-t-il. Le journaliste lui a dit : "On veut Rayane et Olivier." Le père a répondu : "Ah c'est comme ça ? Rayane, prends tes affaires, on s'en va." Je ne l'ai jamais revu. »
Les frasques de cet ancien animateur socioculturel sanguin étaient un sujet de conversation récurrent dans le microcosme. « Norsalam n'était pas ouvert au dialogue et il a fini par se griller partout », regrette l'ancienne amie de la famille. Et ses méthodes d'entraînement, contestées, étaient sujettes aux railleries.
« La manière dont son père l'entraînait rendait impossible la performance », résume froidement l'ex-289e mondial, Corentin Denolly, basé au Centre national d'entraînement (CNE) à Paris en même temps que Roumane, avec lequel les interactions étaient limitées : « On vivait avec Rayane au foyer. Il y avait un énorme décalage de maturité. Tu n'avais pas l'impression de t'adresser à un jeune de 18 ans. »
« Rayane ne faisait que du panier et son père le faisait frapper toujours plus fort, reprend Denolly. Il n'était pas joueur, il était cogneur. Limite, il ne faisait pas le bon sport. Il lui avait fait changer de raquette pour en prendre une plus lourde, 350 grammes, pour gagner en puissance. Résultat, il s'est blessé au poignet. Il l'engueulait tout le temps, c'était invivable. »
Denolly garde en mémoire cet entraînement partagé avec Gasquet et Sébastien Grosjean, un samedi matin au CNE. « On était sur le court 2 et Rayane jouait sur le 6, c'étaient les seuls terrains occupés, recontextualise-t-il. On fait une pause et on voit que Rayane se fait défoncer. Son père lui envoie des balles dessus à bout portant. Des épisodes comme ça, il y en a eu d'autres. Plusieurs fois, les responsables de la DTN étaient là, sur la coursive. Mais ils ne sont jamais intervenus. »
« Quatre semaines de travail pour rien, tête de noeud ! Si tu joues comme ça, tu vas toujours perdre ! » Le père de Rayane Roumane s'adressant à son fils après une défaite
« Je n'ai jamais assisté à quoi que ce soit de malsain, répond Soulès. On entend des rumeurs, mais je n'étais pas là. » « On ne m'a jamais dit qu'il a frappé le fils, assure Di Pasquale. En revanche, des mots durs... » « Quand Rayane déconnait, qu'il ne se couchait pas de bonne heure, par exemple, je ne le disais pas à son père », glisse Malaval.
La pression sur Roumane était constante. À Roland-Garros, en 2017, après sa défaite au premier tour du tournoi juniors contre Thiago Seyboth Wild (1-6, 6-3, 6-4), il a été pris à partie publiquement par son père, qui l'a attendu devant le court, au milieu des journalistes, dont celui de L'Équipe, et des spectateurs. « Quatre semaines de travail pour rien, tête de noeud ! Si tu joues comme ça, tu vas toujours perdre. » Son fils avait encaissé sans broncher. Pourtant, Norsalam Ghedjemis avait pour habitude de ne pas regarder les matches de sa progéniture. « Quand je l'ai battu au Future de Poitiers en 2019, son père avait passé tout le match en dehors du club, mais il lui a quand même mis une soufflante, s'agace Denolly. Il lui faisait le débrief d'un match qu'il n'avait pas vu ! »
Capable de demander à son enfant de 7 ans de crier « je suis Rayane et je veux être champion de tennis » au milieu d'un restaurant Flunch pour lui apprendre à supporter le regard des autres, Ghedjemis contrôlait tout. « Il ne lui laissait même pas avoir un téléphone portable alors qu'il avait 20 ans, révèle Pablo Belitzky. Il ne voulait pas que je sois en contact direct avec son fils. »
Roumane avait péniblement atteint la 358e place mondiale fin 2019 avec, en point d'orgue d'une carrière qui en manque, un tour passé aux qualifs du Masters 1000 de Bercy face au 55e à l'ATP, Miomir Kecmanovic (6-3, 4-6, 7-6). Mais la fin de sa collaboration avec Belitzky, qui a claqué la porte après une énième prise de bec avec le père, l'arrêt du circuit pour cause de Covid et les blessures à répétition, dont une chronique à la hanche mal soignée quand il était adolescent, ont brutalement stoppé l'embellie.
Revenu sur les courts en surpoids et sans structure stable, Roumane a décidé, début 2022, de représenter l'Algérie. Sous un autre nom, celui de son père, Ghedjemis. Selon nos informations, il a signé un contrat de trois ans avec la Fédération algérienne (FAT) et touché environ 17 000 € dans le cadre de la préparation aux Jeux Méditerranéens de 2022. Mais, depuis un an, le contact avec la FAT est rompu. « J'appelle cinquante fois, il ne répond pas, peste le DTN algérien Halim Azzi. Je ne fonctionne pas du tout avec des mercenaires et des joueurs qu'on ne voit jamais. »
Après son titre aux Petits As, l'ado Rayane Roumane prévenait : « Plein de joueurs l'ont gagné et n'ont rien fait derrière. Je n'aimerais pas être ces joueurs. » Peut-il encore devenir autre chose ?
Histoire assez terrifiante. Son père.
Quand on pense au discours de victoire de Sinner et à ses parents (qui ont même pas fait le déplacement)..
Groupe : Members
Messages : 40,011
Inscrit : 30/12/2008
Lieu : Saint-Etienne
Membre no 45
Tribune : Canapé
Citation
Ugo Humbert décroche le sixième titre de sa carrière à Dubaï face à Alexander Bublik
Ugo Humbert n'a fait qu'une bouchée d'Alexander Bublik, samedi à Dubaï. (Satish Kumar/Reuters)
Ugo Humbert (25 ans) s'est imposé en deux sets face à Alexander Bublik (6-4, 6-3), samedi à Dubaï. C'est le deuxième titre du Français dans un tournoi ATP 500, le sixième de sa carrière en six finales disputées. Il va intégrer le top 15 la semaine prochaine.
L'anti-Mannarino.
Beau parcours en plus en battant Hurkacz et Medvedev.
Groupe : Members
Messages : 4,055
Inscrit : 01/09/2013
Membre no 9,465
Tribune : Non précisée
Citation (stoner_man @ 02/03/2024 17:58)
L'anti-Mannarino.
Beau parcours en plus en battant Hurkacz et Medvedev.
En terme de trophées individuels il a déjà un meilleur palmares que Gasquet Par contre il a pas de charisme, 14ème aujourd'hui et pas grand monde le connait
Groupe : Members
Messages : 40,011
Inscrit : 30/12/2008
Lieu : Saint-Etienne
Membre no 45
Tribune : Canapé
Citation (Zivan @ 04/03/2024 12:36)
En terme de trophées individuels il a déjà un meilleur palmares que Gasquet Par contre il a pas de charisme, 14ème aujourd'hui et pas grand monde le connait
En même temps, la moitié du top 10 est inconnue du grand public.